Si les salariés ``bricolent`` en cachette avec l'IA, c'est par défaut !
“Mon Dieu quel bonheur d’avoir un mari qui bricole”, chantait Patachou en 1953 sur des paroles de Georges Brassens. Soixante douze ans plus tard, pourrait-on moderniser le texte et entonner : “Mon Dieu quel bonheur d’avoir un salarié qui bricole avec l’intelligence artificielle ?”
La réponse que donne le rapport sur l’IA de l’Institut national de recherche en sciences et technologies numériques (Inria) et du club Datacraft est mi-figue, mi-raisin : si les salariés bricolent eux-mêmes avec l’IA, c’est souvent faute de mieux dans leur entreprise ; certes, ils participent à une forme d’innovation et de recherche de performance, mais ce faisant, ils peuvent aussi prendre des risques et en faire prendre à leur organisation. Aussi faut-il dépasser ces pratiques.
Des grands discours mais des outils peu adaptés
L’arrivée de ChatGPT d’OpenAI à l’automne 2022 a démocratisé l’usage de l’intelligence artificielle. Dès 2023, 18 % des employés français utilisaient l’IA générative au travail, plus de la moitié d’entre-eux le faisant en dehors d’un cadre défini par les employeurs.
Si les usages informels de l’IA sont si présents dans les sociétés étudiées (*), si les salariés “bricolent” autant dans leur coin, c’est d’abord parce que les entreprises ont du mal à passer des grands discours sur l’IA aux actes.
C’est-à-dire à transformer des ambitions stratégiques sur l’intelligence artificielle en usages réels sur le terrain découlant d’une véritable politique “d’industrialisation de l’IA”. Et lorsque ces projets IA d’entreprise sont industrialisés (dans 20 % des cas seulement), ils ne concernent pas tous les métiers ni ne sont en prises avec le travail réel. Ces projets sont construits d’en haut, dans une logique gestionnaire de rationalisation, d’automatisation et de standardisation.
“Savoir prompter, une compétence-clef”, “Ce décalage provoque une forme de rejet ou d’indifférence des professionnels, qui peinent à voir l’utilité ou la légitimité de ces outils dans leur contexte”, écrit l’Inira.
Aussi les salariés font-ils leur propre cuisine pour développer des usages correspondant à leurs besoins réels, qu’il s’agisse de traduire un texte, de mieux le structurer, de faire une veille, de reformuler un mail ou de chercher des idées.
Ils n’en parlent pas à leur hiérarchie, mais testent et expérimentent à leur niveau. Comme les Shadoks sachant pomper, le “savoir prompter” devient une compétence-clef.