Etes-vous déviant mineur ou déviant majeur ?

Se sentir bien au travail suppose un ensemble de conditions positives, telles qu’un climat serein, de la reconnaissance, la possibilité de prendre des initiatives, acquérir de l’autonomie, s’estimer et être estimé.

Cependant l’accroissement du nombre de Comportements Antisociaux Au Travail (CAAT), anti organisationnels et anti individuels et de Comportements Indésirables au Travail (CIT) ensemble d’agissements de violence et d’incivilités, sont contre-productifs et bien souvent délétères. Il est important de les identifier, de les prévenir afin d’en diminuer la présence dans les entreprises et cela quel que soit le secteur d’activité.

 

Que dit la loi ?

Les comportements de violences verbale, psychologique ou physique, les discriminations, les situations de harcèlement moral ou sexuel, la maltraitance institutionnelle ou organisationnelle, les mauvais traitements, les pratiques abusives consécutives à la pression financière, les incivilités, la tyrannie… sont à prohiber activement, dans les entreprises, d’autant plus que ces derniers sont pour partie cadrés sur le plan règlementaire (cf. les articles 222-7 et suivants du code pénal, et l’accord du 17 juin 2011 relatif au harcèlement et à la violence au travail et la loi 2016-339 du 22 mars 2016). Leurs dispositions doivent figurer dans le règlement intérieur et l’entreprise se doit, par tous moyens d’affichage et de communication, d’informer les collaborateurs des articles 222-33-2 (sanction du harcèlement moral) et 222-33 (sanction du harcèlement sexuel) du Code pénal.

 

La violence au travail

La violence au travail apparait sous des formes très diverses telles que les rumeurs, les jurons, les insultes, les mauvais tours, les disputes, les dommages matériels, le vandalisme, le sabotage, la bousculade, le vol, l’agression physique, le stress psychologique, les accès de colère, l’incendie volontaire, le viol et le meurtre.
Les comportements antisociaux en entreprise sont depuis environ 20 ans devenus dans les pays industrialisés, une préoccupation organisationnelle et sociétale.

La présence de comportements contre-productifs que sont la violence et les incivilités au travail ont un impact ravageur sur les organisations et les individus. Alors que de nombreux faits permettent de constater les dommages que provoquent ces comportements, tels que, les coûts économiques, la diminution de la satisfaction au travail, l’augmentation la détresse psychologique des collaborateurs…, ces comportements déviants perdurent, augmentent et impactent indifféremment tous les secteurs d’activités.

Pour illustration, l’enquête Sumer de 2003 a révélé qu’1 salarié sur 6, estime être l’objet de comportements hostiles dans le cadre de son travail, qu’ils s’agissent de comportements méprisants ou d’atteintes dégradantes. Celle de 2010 a révélé que 22 % des salariés – soit plus d’1 salarié sur 5 – déclarent que dans le cadre de leur travail, ils sont confrontés systématiquement à un ou des comportements hostiles.

Par ailleurs, au-delà, des répercussions directes sur « l’ambiance de travail », les impacts des CIT nuisent à la performance de l’entreprise et à la qualité de vie au travail des collaborateurs, ce qui en fait aujourd’hui un enjeu majeur sur le plan préventif et performatif.

Au premier chef, se trouvent les personnes exposées à du public devant quotidiennement faire face aux violences et incivilités « externes » (clients, patients, usagers, fournisseurs, …), et de surcroit, en « interne » dans les relations avec les collègues et/ou la hiérarchie, ce cas de figure étant imputable à tous types d’organisations.

D’après, Bennett & Robinson-2003*, la déviance, associée à un ensemble d’autres phénomènes comme le comportement antisocial et la violence organisationnelle sont, en milieu professionnel, des types de comportements individuels visant à nuire intentionnellement à d’autres acteurs et/ou aux intérêts légitimes de l’organisation, selon une gravité, envisagée comme mineure ou majeure.

Partant de ces constats, il est aujourd’hui urgent d’agir sur ces risques, de les identifier et d’en diminuer la présence afin de recréer du lien et de rassembler le collectif autour de valeurs clés « de bien vivre ensemble », de « responsabilité sociale » et « de comportements citoyens » en entreprise.

*Ces auteurs proposent une matrice permettant d’identifier le type de déviance (organisationnelle ou sociale) ainsi que le niveau de gravité (déviance forte ou faible)

Cadre, encadrement et travail en équipe

Traditionnellement les tâches sont réalisées sur une base individuelle, mais dans un contexte où les individus doivent collaborer entre eux afin de réaliser des tâches communes, les comportements contre-productifs peuvent s’avérer particulièrement nuisibles pour le collectif de travail.

Selon Anderson et Pearson (1999), le manque de civisme au travail, correspondrait à une violation des règles collectives de respect ou de savoir-vivre, à un manque de considération générale pour les autres se caractérisant par des comportements rudes et non courtois, en contexte d’emploi. Ils seraient indifféremment à tous ou ne ciblent ni un individu ni un groupe précis au travail.

De plus, selon Daniellou (2012) « les comportements indésirables au travail » sont la conséquence de débats sociaux sur le travail qui n’ont pas lieu ».

Le travail en équipe est une des plus anciennes technologies sociales de production. Pour réussir, les collaborateurs œuvrant dans un contexte de travail en équipe doivent, au-delà du fait de savoir travailler ensemble, recevoir un encadrement adapté de la part du système managérial et organisationnel.

En effet, une organisation « prescrit » des normes de travail (ordres de l’encadrement, procédures et objectifs, normes qualité, règles sécurité, fiches de postes…) autant que des outils et pratiques de « contrôle » (suivi des salariés par l’encadrement, reporting, certificats de conformité, répertoire d’incidents, entretiens d’évaluations…). Ces normes « prescrites » qui ne constituent pas le « travail réel » mais en dessinent les contours, sont nécessaires à la définition d’un socle de travail commun, partagé et sécurisant.

C’est souvent lorsque le « cadre de travail » ou « système de règles » est flou ou inexistant qu’une organisation « laisse place aux dérives et excès » et expose ses salariés au sentiment d’insécurité. En l’absence de système de règles, l’individu seul peut difficilement agir sur cette violence organisationnelle, car c’est bien à l’organisation de fixer les règles du jeu. Dès lors, plus l’organisation tarde à agir, plus le cadre dérive et plus il est difficile de « recadrer ».

Les conséquences des incivilités sur la productivité et la santé des salariés diffèrent selon les classes d’âge. Choc des générations ? D’après une étude publiée en 2016, plus d’un salarié sur 2 estiment que “les comportements incivils sont liés à l’âge”, la génération des 16-34 ans, est réputée comme « la plus incivile”, tandis que les + de 55 ans réagissent vivement aux atteintes des règles sociales.

 

Quelles solutions apporter ?

Selon (Gill, Fisher et Bowie (eds), 2002; Chappell et Di Martino, 2000; Toohey, 1993) les méthodes de prévention de la violence au travail auraient avantage à faire partie de la stratégie de l’entreprise, en étant intégrées aux principaux objectifs et aux pratiques quotidiennes de gestion du personnel ainsi que de la santé et sécurité au travail.

Les comportements indésirables au travail font partie des risques psychosociaux. Ils entrent dans l’obligation générale de sécurité de l’employeur. Par ailleurs, la règlementation (française et européenne) tente d’apporter des éléments de réponse, pour maîtriser, prévenir et contenir ce phénomène.
Un nombre important de solutions existent telles que :

  • Informer, former sur la « civilité » en entreprise,
  • Travailler sur la culture de l’entreprise,
  • Mettre en place une Charte d’entreprise sur la qualité de vie au travail,
  • Faciliter la remonter de ces comportements indésirables au travail et répertorier les situations pour avoir une vue d’ensemble (ex. fiche incident, à suivre en réunion de CHSCT,
  • Considérer les situations de tensions relationnelles non plus comme des problématiques individuelles mais comme de potentielles manifestations de dysfonctionnements organisationnels,
    Suivre régulièrement des indicateurs pertinents.
  • Repérer si certains facteurs existent et pourraient représenter un terrain propice au développement de relations délétères.
  • Lorsque l’on est victime d’incivilités, ne pas rester sans rien dire, car certaines personnes ne sont pas conscientes de l’impact de leurs comportements sur l’entourage,
  • Coaching pour les collaborateurs « toxiques »,

 

En conclusion, il semble que les CAAT et CIT doivent faire l’objet d’un véritable travail de fond à positionner dans les entreprises sur un plan stratégique et non pas uniquement préventif, en effet, selon (Gill, Fisher et Bowie, 2002; Chappell et Di Martino, 2000; Toohey, 1993) les méthodes de prévention de la violence au travail auraient avantage à faire partie de la stratégie de l’entreprise, en étant intégrées aux principaux objectifs et aux pratiques quotidiennes de gestion du personnel ainsi que de la santé et sécurité au travail.

 

Ou se documenter ?

L’INRS met à disposition des fiches d’information et des vidéos, sur les violences internes et externes au travail.

 

Article rédigé par
Anne RICHARD
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